Sang dieu, rien ne va plus !! une chorale que l’on croyait sage, une chorale de bonne renommée, une chorale qui tout au long de ses 25 ans d’existence avait su s’attirer l’estime de tous ses admirateurs et ils étaient nombreux, une chorale, enfin, qui tout au long de ses concerts avait ravi son public avec des chants profanes, religieux, tendres, parfois amers, souvent très drôles ou gentiment satiriques, et, tout ça grâce à la complicité de musiciens, d’auteurs et de créateurs, une chorale qui allait droit sur le chemin des concerts, dont rien dans son répertoire ne contenait une fausse note, une chorale qui respirait et chantait l’harmonie, une chorale dans laquelle on sentait une âme s’élevant au plus haut avec ses altis, ses basses, ses sopranes et ses ténors ..sans parler de sa chèffe, de grande classe, distillant son savoir comme on accomplit une mission presque divine, trouvant dans ses voix qui montaient haut, qui tombaient bas, la quintessence de l’extase musicale.

Hélas hélas hélas tout est balayé ! … le travail de toute une moitié de vie est remis en question, que dis-je remis en question, plutôt annihilé, désintégré, nucléarisé. Il n’y a plus rien plus rien… adieu les saines traditions, les chants et chansons policées, les refrains de bonne compagnie… au revoir, peut-être à jamais, les ritournelles classiques, adieu les chants religieux chantés par cinquante voire soixante choristes frigorifiés dans des églises glaciales ou le christ même sur sa croix réclame un manteau, adieu notre Bobby nous ne serons plus à la pointe de ton humour, rentre en Aragon ou rejoint la Castille avec Framboise… à Villefontaine tu es Persona Non Gratta… ta guitare.

Bougresse de chorale !! tu as changé ton fusil d’épaule, tu as fait volte-face, tu viens de retourner ta veste, tu te renies et tout ça pourquoi ? pour des refrains que tu n’as jamais chantés, des chants qui parlent de la lutte des hommes, de la fraternité et même des refrains contre la guerre, contre les tueries, les massacres, les barbaries… oh la la ! tu as perdu la tête tu es folle !! la peine des hommes, la fraternité, les luttes contre toutes les oppressions, où es-tu allée chercher tout ça ? dans le passé, me dis-tu, mais le passé n’intéresse personne c’est une vieille lune… ; d’ailleurs on va supprimer l’Histoire dans les écoles, on n’a pas de temps à perdre avec toutes les tristes et sombres histoires de l’Histoire… L’Histoire avec les libertés bafouées, avec ses humilié(e)s, ses offensé(e)s, ses fusillé(e)s, ses massacré(e)s et ses torturé(e)s, ses rebelles et ses insoumis(es), ses objecteurs et ses ‘refus d’obtempérer’ … ceux qui ont dit non et ceux qui n’ont pas dit oui, ceux qui ont défendu leurs frères, ceux qui sont morts debout et ceux qui ont souri à leurs bourreaux, ceux qui ont ‘déclaré ‘je meurs sans haine en moi pour le peuple allemand’ et ceux qui ont crié ‘No Passeran’…

Oui oui oublions tout ça, sacre dieu, oublions ce que nous devons à nos pères, ces fous qui firent la grève et se battirent pour demander un avenir meilleur pour eux et leurs enfants, ces fous qui croyaient béatement que le peuple doit être gouverné par le peuple, ces femmes qui réclamaient des droits, et puis quoi encore, que les hommes leur ont longtemps comptés, ces enfants qui travaillaient à huit ans dans les mines ou les ateliers, les petits ramoneurs qu’on mutilait pour qu’ils puissent passer par les cheminées, sacredieu il faut vivre dans le présent… avec les People, les Reality Shows, devant la téloche, ce n’est pas là au moins qu’on entendra L’Internationale, Les Canuts, Bandiera Rossa ou La Butte Rouge.

D’ailleurs y’a pas de raison qu’on les entende puisque tout va bien Il n’y a qu’Avanie et Framboise pour mettre les pieds dans le plat, la Virago, pour faire entendre une autre petite zizique A-t-on idée de nous parler des luttes sociales, des grands mouvements révolutionnaires, de nous rappeler le temps des cerises, le temps de la ‘mano dans la mano’, l’époque des espérances souvent déçues mais revenant toujours à la charge. Et ça au XXIème siècle qui baigne dans l’opulence, où les gens sont rassasiés, repus, jouissant de tous leurs droits… où règne le plein emploi et des salaires très élevés peut-être trop élevés avec un ascenseur social qui fonctionne de plus belle à l’envers, où la pauvreté n’existe plus, où il n’y a plus de femmes battues ni d’enfants martyrisés, où le frère ne régit plus la vie de sa mère et ses sœurs, où la Burka est entièrement transparente et où comme dit la chanson ‘les soldats sont troubadours il n’y aura plus de misère’.
Sang dieu je souhaite qu’il y ait beaucoup de monde à ce concert, beaucoup beaucoup de monde et que tous ces gens vous disent leur façon de penser et de chanter et qu’ils chantent tous avec vous ces magnifiques chansons de lutte de refus d’espoir ces chansons de nos aïeux encore bien présentes dans nos cœurs et nos voix et qui resteront n’en doutons pas des chansons pour toujours, hier aujourd’hui et demain.

GP